Retraite 2003 !

Le "deal" Chérèque-Raffarin de 2003

LE MONDE | 26.09.07 | 15h23 • Mis à jour le 26.09.07 | 15h23

Il est 4 h 30 du matin, le 15 mai 2003. François Fillon, ministre des affaires sociales du gouvernement Raffarin, vient de perdre une partie décisive. Après dix heures de négociation sur la réforme des retraites, les syndicats claquent la porte. "Le compte n’y est pas", tranche François Chérèque, le leader de la CFDT, sur lequel le gouvernement compte pour faire passer la réforme : les syndicats les moins hostiles au projet gouvernemental, la CFDT, la CGC et la CFTC, disent être allés "au bout de leurs possibilités". Les ministres aussi.

Matignon reprend la main au petit matin. "On ne peut pas faire une réforme des retraites sans la CFDT", répète Jean-Pierre Raffarin. Il le fait à nouveau savoir à François Chérèque. Invité de Jean-Pierre Elkabbach, sur Europe 1, le numéro un de la CFDT accuse réception du message : "Si le gouvernement fait un geste, dit-il, nous sommes prêts à faire l’autre."

A midi, François Fillon reçoit à nouveau M. Chérèque. "Fillon lâche la proposition sur la retraite avant 60 ans pour les carrières longues que devait faire Raffarin", se souvient un proche de l’ancien premier ministre. Le coût du dispositif, estimé alors à 1,3 milliard d’euros, doit permettre à 200 000 personnes, ayant commencé à travailler à 14, 15 et 16 ans, et ayant travaillé quarante ans de partir avant l’âge légal de la retraite, toujours fixé à 60 ans. Un nouveau rendez-vous est fixé à 17 heures, au ministère du travail avec l’ensemble des syndicats, sauf la CGT, qui refuse de s’y rendre.

Dans l’intervalle, François Chérèque est reçu discrètement, dans l’après-midi, par Jean-Pierre Raffarin. Le premier ministre abat ses deux dernières cartes secrètes. Il propose d’améliorer le régime général pour les infirmières libérales : François Chérèque, issu du milieu hospitalier, apprécie. Et le premier ministre s’engage à "soutenir" la CFDT sur le régime des intermittents du spectacle.

Carrières longues, infirmières, intermittents : François Chérèque accepte le "deal" et se rend aussitôt à la réunion prévue au ministère du travail. Il en sort, une heure plus tard : "C’est un compromis acceptable." Le front syndical est rompu. Il est 18 h 30, ce jeudi 15 mai.