Agenda social dans la Fonction publique :

- Discours du Secrétaire général de l’UNSA, Alain Olive, lors de la réunion présidée par le Premier ministre, François Fillon.

le lundi 4 février 2008

Monsieur le Premier ministre,

Dans son rapport sur la modernisation du dialogue social, Dominique-Jean Chertier écrivait ceci :

«  La position particulière de l’Etat employeur fait du dialogue social dans la fonction publique un sujet emblématique. Par voie de conséquence, elle fait des difficultés de ce dialogue un élément de perturbation pour l’ensemble des relations sociales de ce pays. »

- A l’UNSA, nous partageons ce constat.

Nous devons donc nous appliquer, ensemble, à maintenir dans la fonction publique un bon niveau de dialogue social et cela, au moment même où les réformes que vous annoncez, dans le temps imparti, n’ont pas d’équivalent depuis la Libération.

- Quel est notre état d’esprit face à ce qui se présente comme des bouleversements majeurs pour notre fonction publique ?

Nous sommes prêts à l’UNSA à réfléchir à une nouvelle configuration de l’Etat, nous sommes prêts à réfléchir à une nouvelle hiérarchie de ses missions, nous sommes prêts à ce que ses modes d’action soient profondément revus. Car nous savons bien que l’Etat plongé dans la mondialisation ne peut ressembler à l’Etat providence d’hier.

- Mais contrairement à certains, nous ne sommes pas des adeptes du moins d’Etat.

Nous pensons au contraire que l’Etat contemporain aura à gérer de nouveaux risques, qu’il s’agisse du risque écologique, du risque de l’exclusion, des risques de la dépendance comme des risques provoqués par la montée de la précarité. Et ce ne sont là que des exemples.

Il s’agit donc d’inventer un nouveau modèle pour l’Etat du XXIème siècle, un Etat à la fois stratège et solidaire.

Mais pour entreprendre ce vaste chantier de la modernisation de l’Etat, vous devez avoir, Monsieur le Premier ministre, l’appui et le soutien de celles et de ceux, fonctionnaires, qui vont au jour le jour faire entrer cette modernisation dans les faits.

Or, je voudrais vous le dire très directement à l’occasion de cette réunion : le malaise ressenti sur le terrain par les fonctionnaires va croissant, qu’ils relèvent de la fonction publique de l’Etat, de la fonction publique hospitalière ou de la fonction publique territoriale. Ils ont le sentiment que l’on ne s’intéresse à eux qu’à travers par le prisme des économies budgétaires. Qu’ils sont seulement considérés comme une charge pour le budget de l’Etat.

- Nos collègues ne comprennent pas qu’on n’apprécie pas bien leurs missions, qu’on refuse de considérer leur professionnalisme, qu’on ne reconnaisse pas les difficultés liées à leurs conditions de travail, ni leurs demandes de justes rémunérations.

Ils s’interrogent, Monsieur le Premier ministre, au-delà de leur métier sur l’avenir de la Fonction publique elle-même et des valeurs qu’elle porte. Ces éléments expliquent l’ampleur de leurs mobilisations dans la dernière période.

Alors les fonctionnaires - rassurez-vous- ne font pas de dépression masquée ; ils n’ont pas besoin de « calinothéraphie » ; ils veulent simplement de votre part un engagement qui donne du sens à leur mission de service public. Ils veulent un vrai dialogue social, ils veulent des gestes forts sur le pouvoir d’achat.

Car on ne pourra pas remobiliser les fonctionnaires si l’intendance ne suit pas.

Il n’est pas possible d’admettre que les agents publics servant l’intérêt général perdent du pouvoir d’achat.

- C’est pourquoi, nous avons manifesté notre divergence d’appréciation avec les propositions de votre gouvernement. Pour nous, le principe de la fonction publique de carrière est fondamental et il sous- tend une logique de négociation collective des rémunérations.

- Au centre de celle-ci, nous restons, fondamentalement attachés au point d’indice.

- L’augmentation du point nous apparaît comme le plus juste système puisque profitant à tous les agents, quel que soit leur grade, dans l’ensemble de la fonction publique.

Vous le savez, Monsieur le Premier ministre, nous ne sommes pas opposés à l’ouverture de discussions franches sur d’autres thèmes comme les heures supplémentaires, le rachat des comptes épargne temps ou l’action sociale.

- Mais avant cela, les fonctionnaires attendent de vous une mesure forte sur le point d’indice.

C’est cette demande qui a été principalement portée par les importantes mobilisations des 20 novembre et 24 janvier.

- L’emploi public est également au cœur des préoccupations des salariés.

- Les annonces massives, brutales et sans réelles concertations, de suppression de postes ne peuvent nous convenir.

Il faut ouvrir sans attendre une vaste réflexion sur les missions de la fonction publique et, en particulier, sur le périmètre de l’Etat.

- Le Président de la République l’a dit, le service public français est reconnu partout pour son excellence, la qualité et l’investissement de ses fonctionnaires.

Aussi, que des redéploiements soient nécessaires, que l’évolution territoriale de l’Etat implique des réorganisations, nous le comprenons dès lors qu’il s’agit de mieux servir l’intérêt général.

Il faut donc que sur tous les sujets s’ouvre un véritable dialogue où nous pourrons être force de proposition.

Car, nous partageons, à l’UNSA, le constat que notre système doit évoluer : déroulement de carrière, mobilité, formation, seconde carrière.

- Tout cela doit incontestablement être modernisé, mais dans une logique respectant les principes fondamentaux du statut de la Fonction publique.

- Comme l’ensemble de notre pays, la fonction publique va être confrontée à une révolution démographique.

- Demain il faudra recruter massivement des fonctionnaires, et cela, en concurrence directe avec les besoins de recrutement du secteur privé.

Pour attirer les jeunes dans la fonction publique, il faut rendre cette dernière véritablement attractive : rémunération, intérêt des postes, mobilité, promotion, tout cela dans le cadre d’un statut général, garant de neutralité et d’égalité pour tous les citoyens sur l’ensemble du territoire.

Aussi, partie prenante dans les débats et ayant participé activement aux conférences sociales de la fonction publique, nous vous demandons à nouveau d’être pleinement associés à la révision générale des politiques publiques.

En effet, les premières mesures annoncées suscitent de vives inquiétudes dans les services, en particulier en administration centrale.

Mais l’UNSA est également intéressée par les travaux engagés sur la réorganisation de l’Etat, au niveau territorial.

Jusqu’à présent, à aucun moment, n’ont été traitées les difficultés liées aux transferts des personnes et à la restructuration des services.

- Pour nous, il est essentiel que l’Etat conserve une représentation forte à l’échelon national, régional, mais aussi départemental.

- Un Etat fort, présent sur l’ensemble du territoire nous semble indispensable dans le contexte des pouvoirs accrus donnés aux collectivités territoriales.

Nos objectifs sont communs : meilleure efficacité du service rendu aux citoyens, meilleure lisibilité de l’action administrative, maintien de la cohésion sociale. Tout ceci grâce à des fonctionnaires motivés.

Vous le voyez, Monsieur le Premier ministre, sur tous les sujets, l’UNSA, est prête au dialogue. Celui-ci sera d’autant plus facile si le contentieux salarial est levé.

Alors nous aborderons sans réticences les discussions sur les réformes à venir.

Je vous remercie.