L’Europe et une inspection du travail généraliste à la française....

Notre collègue, Jean-Claude Mercurin, délégué au congrès interprofessionnel de l’UNSA, s’est exprimé le jeudi 17 mars à la tribune pour l’UNSA Itefa, fédération dont une de ses composantes est l’inspection du travail.

- L’UNSA-Itefa ne peut qu’exprimer son soutien et sa solidarité aux amis de RENAULT-DOUAI.

- L’inpection du travail française se doit de rappeler son profond attachement aux conventions du Bureau International du Travail (B.I.T.) et plus spécifiquement aux conventions 81 et 86 qui garantissent l’INDEPENDANCE de l’inspection du travail.

- C’est au nom de cette indépendance que nos collègues Sylvie Trémouille (contrôleur du travail) et Michel Bussières (MSA)ont été lâchement assassinés, le 2 septembre dernier, par un individu qui tentait de se soustraire à l’application du droit du travail. Nos pensées vont vers eux aujourd’hui.

- Si nous avons pris bonne note de l’amendement 91 bis de la résolution finale, concernant le renforcement significatif de l’inspection du travail, nous appelons les congrèssistes à le voter massivement.

Une question nous préoccupe. Elle touche à l’éthique même de nos métiers, aux missions qui sont confiées à l’inspection du travail. Elles ne doivent pas se limiter, comme c’est le cas dans de nombreux pays européens, aux compétences d’hygiène et de sécurité. Elle doit rester GENERALISTE, au service des salariés, mais aussi à l’écoute des entreprises par les voies du conseil, de la conciliation et de la négociation. Car, dans l’entreprise, l’emploi, les conditions de travail, au sens large du terme, la formation professionnelle forment un tout indissociable.

- L’inspection du travail et ses membres se trouvent dans un climat d’interrogation constant entre l’avis qu’ils devront porter sur le projet de constitution européenne en tant que citoyen et le démantèlement orchestré du Code du Travail.

Et le démantèlement commence avec le projet de la constitution avec les points négatifs qui ont été évoqués. Je ne reviendrai pas sur la substitution de la notion du droit du travail par celui du droit de travailler ! La différence a été brillamment développé Mardi.

En fait nous nous trouvons dans un système de "poupées russes". La première, celle qui cache les autres, c’est la constitution. Certaines poupées risquent de causer des surprises quand elles seront connues ! Mais, il y en a une tapie en embuscade, que nous connaissons : la poupée Bokelstein directive dont le jour de l’ouverture du congrès, Bruxelles a réaffirmé le maintien. J’ai bien entendu ce matin que rien n’était définitif au moins dans sa rédaction. Mais, à l’inspection du travail, nous sommes comme Saint Thomas, tant que nous n’avons pas vu ou touché du doigt, nous sommes sceptiques !

Cette directive ne signifie pas ce qu’on nous présente habituellement.

Ce n’est pas le fameux exemple, régulièrement servi, de l’ouvrier polonais ou lituanien qui vient travailler en France avec un contrat de travail du pays d’origine. NON !
Cette directive autorise l’application du droit du travail ou son ersatz, ou sa caricature, du pays où se trouve installé le siège social de l’entreprise.

- Ce sont les salariés français qui demain seront embauchés par un lituanien pour travailler en France à qui on appliquera le droit du travail lituanien !

Pire demain, une entreprise française pourra, dans un premier temps se délocaliser dans un pays ou le droit du travail est beaucoup moins contraignant, puis envisager l’embauche de salariés pour des activités sur le sol français, avec l’application d’un droit du travail (controlé par qui ?) qui se résume à quelques feuillets insipides, à une parodie de droit ! Cela pourra faire boule de neige et devenir une véritable avalanche...

- Où se situera la protection des salariés, des représentants du personnel et bien entendu des syndicats ?

- Qui interviendra pour le respect du droit du travail et de quel code ? Quid des IRP ? Que deviendra la prudh’ommie ? Quel sort sera réservé aux conventions collectives locales, régionales et nationales ? Tout cela se résumera à une peau de chagrin s’amenuisant sans cesse !

- Quant aux conventions collectives européennes, auxquelles pour ma part je croyais, elles ne deviennent, dans ce contexte qu’une utopie à moins qu’elles se résument à un fantôme de convention...

- L’inspection du travail sera-t-elle toujours une véritable magistrature sociale ?

- Un constat que je vous livre : les lobbies d’influence économiques et financiers exercés par le MEDEF dans les couloirs de Bruxelles semblent prendre le pas sur l’ensemble du code du travail, dernier rempart pour la protection des salariés !

- Ce que le MEDEF n’a pas obtenu à Paris, il l’a obtenu à Bruxelles !

- A quand une charte européenne sociale digne de ce nom ?

L’Europe sociale, telle que nous la concevons et que nous appelons de nos voeux ne serait-elle, dans cette configuration qu’un magnifique mirage ?!!!

- Je vous remercie.


P.-S.

- Prochaine directive : le temps de travail... Les 35 heures ne seront-elles démantelées dans cette nouvelle mouture...? Le silence du MEDEF est assourdissant...